vendredi 13 janvier 2012

Identités multiples par Flora

Comme je l'annonçais il y a quelques jours les Mardis hongrois de Paris ont eu l'idée de donner, régulièrement, chaque mois s'ils en ont l'envie, l'image, le dessin et la plume à des amis talentueux. Ou pour être plus précis, ce sont ces amis qui nous font le plaisir de nous offrir quelques échantillons de leur talent. C'est Flora qui nous entraine aujourd'hui dans le monde des mots français, hongrois, universels...
Jean-Pierre
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Parmi les lecteurs potentiels du blog des Mardis hongrois de Paris, il n'y a probablement pas grand monde que la question de son identité multiple et complexe, colorée par son histoire voire celle de ses parents et reçue en héritage, n'aurait pas effleuré...

On m'a souvent posé la question. Je reçois même, par moments, d'amicales pressions des amis, témoins d'une autre vie qui a occupé mes 25 premières années... Comme s'ils me reprochaient une sorte d'infidélité pour ne pas dire trahison envers la patrie ("Szívet cseréljen, aki hazát cserél!") que j'ai abandonnée. La langue aussi, que je ne pratique plus assez régulièrement et qui a tendance à racornir et à céder la place au français, ma langue d'adoption.

Dans une autre vie, j'ai été professeur de français et de russe dans la Hongrie des années soixante-dix. Mon russe était bien meilleur que mon français, du fait du long stage d'un an et demi aux universités de Moscou et de Leningrad. Mais le destin s'est présenté en la personne d'un assistant de français au lycée où j'enseignais et c'est lui qui m'a véritablement initiée à un français magnifique, riche et exigeant. (Ecrivain, il a beaucoup publié après notre retour définitif en France, à partir du début des années 90.) Son contrat terminé en Hongrie, nous avons séjourné à Constantine en Algérie, à Berlin-Ouest et à Istanbul. Alors, on peut imaginer les minuscules strates s'ajoutant à une identité qui ne peut rester insensible à toutes ces influences!

Une identité, à mon sens, n'est pas un monobloc figé que nous recevons une fois pour toutes. Elle doit s'enrichir de toutes les empreintes gravées. Pour moi, le français n'est pas une "langue ennemie" comme le disait Agota Kristof. Il est un enrichissement qui s'ajoute à ma langue maternelle, celle que je me dois de cultiver parallèlement comme un retour aux sources essentielles. Un retour essentiel.

Cela fait maintenant plus de 5 ans que mon mari est décédé. Sous le choc, ma première réaction a été de fermer la parenthèse française de 33 ans de ma vie et de retourner aux commencements... Me rajeunir aussi, peut-être?... Cela a duré 3 à 4 jours. J'ai décidé de rester dans le Nord, là où il repose, dans cette terre austère et chaleureuse, parmi ces gens souvent laissés pour compte, sans prétention. Le coeur sur la main. Comme ceux que j'ai quittés il y a si longtemps, voilà 38 ans...

Flora

Le blog de Flora en français

Flora magyar blogja

2 commentaires:

  1. Très beau , le texte de Flora sur les identités multiples. Au moins une pensée qui nous élève au-dessus de toute ces passes d'armes ennuyeuses entre nos politiciens de tous bords. Excellente idée!
    Bravo!
    Pierre Waline

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    Réponses
    1. Cher Pierre Waline, merci de votre commentaire. Je suis attentivement vos articles sensibles et connaisseurs sur la Hongrie (nous avons même échangé une fois ou deux plus longuement...).

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